Ursus Minor : What Matters Now
Usus Minor n’enregistre pas souvent et chacun de ses albums est attendu avec ce léger bouillonnement montant qui caractérise les amateurs de musique en quête de primeur et de sens. Après Zugzwang en 2003, Nucular en 2006 et I will not take ‘but’ for an answer en 2010, le quartet revient avec un double album réalisé lors d’un séjour du groupe à Treignac en Corrèze, un album au titre très parlant : What Matters Now.
Pour son quatrième opus, Ursus Minor offre une suite à deux faces, car tout dans le monde a deux faces. Une suite à deux faces en quatre parties, nombre de bonne orientation (4 points cardinaux, 4 saisons, 4 éléments), où les quatre hommes de l’orchestre Tony Hymas, Grego Simmons, François Corneloup et Stokley Williams) invitent comme les étoiles, de bien des amicales visites pour générer de petites foules.
Dem Atlas, nouvelle coqueluche du rap minnesotan de Rhymesayers qui concentre bien des afflux de regards et d’oreilles, la rappeuse b-girl Desdamona (d’Ill Chemistry) et la chanteuse Motown Ada Dyer, les accompagnent tout au long de ses faces.
Sur quelques titres, d’autres amis se joignent comme le violoniste et compagnon de route Dominique Pifarély, le duo de musique celtique Le Bénéfice du doute, l’acteur Frédéric Pierrot pour quelques réminiscences résistantes, la clarinettiste d’Aquaserge Manon Glibert, Bernat Combi, chanteur d’une sorte de blues limousin, Patrick Dorcean batteur du dernier trio de Jef Lee Johnson et les jeunes slammeurs Anna Mazaud et Léo Remke-Rochard.
Le livret, où figurent toutes les paroles, voit chacune des quatre séquences illustrées respectivement par Zou, Laurent Lebot, Emre Ohrun et Florence Dupré la Tour avec, en intermède un cahier photographique de Val K (va-et-vient entre le Chiapas et Notre-Dame-des-Landes), et des portraits illustrés de James.
Au travers de sa musique aux teintes de funk-jazz-rap-soul-rock-blues-musique traditionnelle et au-delà, sa pulsation d’une sorte de présent perpétuel, un présent conscient comprenant le passé, faisant face au futur, Ursus Minor livre dans What Matters Now, sa perception du monde, de ses racines distinctes et bonnes voisines, de ses transmissions générationnelles en prenant la mesure des modifications apportées par les années, d’harmonies, de peines, de brutalités, d’amour, réunis sur un chemin de traverse d’un seul tenant.
Nato musique
Est-il encore nécessaire de présenter les éditions musicales Nato, montées en septembre 1980 par Jean Rochard [1], à la fois producteur, directeur artistique et surtout "engagé" dans une démarche où la conscience, y compris politique, est une arme qui passe aussi par la musique ? [2]
– En 1996, en deux disques, 36 plages musicales et au travers d’un livret richement illustré, Nato revient sur Buenaventura Durruti , son histoire et celle de la révolution espagnole [3]. Musiciens, chanteurs, écrivains, acteurs s’interrogent et créent une dédicace sans nostalgie et pleine d’actualité, à laquelle participera Abel Paz [4].
– En 2010, un album est consacré à Gustave Courbet et à son "origine du monde". Un orchestre de 23 musiciens alterne alors avec un petit ensemble composé de la harpiste Hélène Breschand, de l’accordéoniste Janick Martin, du violoncelliste Didier Petit et d’Hymas au piano. Un livret de 112 pages accompagne le disque et poursuit cette suite d’impressions, de variations, d’interprétations et de questionnements autour de l’œuvre.
– "Chroniques de résistance" est publié en 2014. Un compagnonnage se forme autour de Tony Hymas (compositeur et pianiste). Musique, textes et chansons se mêlent pour rappeler la présence des étrangers dans les maquis ou les armées de la France Libre, grands oubliés de la victoire à laquelle ils ont pourtant tant contribué et parmi eux, cette présence capitale de milliers d’Espagnols qui continuaient une guerre contre le fascisme, commencée plus tôt chez eux, ou encore ces autres Espagnols de la Nueve qui entrèrent dans Paris le 24 août 1944, le maquis limousin de ce résistant hors normes que fut Georges Guingouin, l’action déterminante des femmes Marianne Cohn, Germaine Tillion, Suzy Chevet, Olga Bancic, la Libération contrariée et ce qu’il nous reste à parcourir.
Pour raconter ces pages d’histoire, la poésie de René Char, celle de Robert Desnos ou d’Armand Gatti, les paroles de Sylvain Girault ou Serge Utgé-Royo, les intentions de John Holloway, Barney Bush ou David Miller sont convoquées. Les illustrateurs Jeanne Puchol, Sylvie Fontaine, Vincent Bailly, Vaccaro, Daniel Cacouault, Stéphane Levallois prolongent cet ensemble dans un livret de 148 pages…