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À Woodstock, l’incantatoire "no rain" n’a eu aucun effet sur la météo…



vendredi 6 mai 2016,


Lucie Heymé


Réflexions Social

Avec 500 000 spectateurs réunis pour "3 jours de paix, de musique et d’amour", au son de 32 groupes, dont Hendrix, Santana, Ten Years After, Country Joe, Sly and the Family Stone ou Janis Joplin, le festival de Woodstock (15-18 août 1969), est considéré comme un événement des plus importants dans l’histoire du rock ou de la contre-culture. Pour un bon nombre de festivaliers, l’esprit qui y régnait portait une promesse de "changer le monde". Aujourd’hui, le site est marqué d’une plaque commémorant la fête.

"no rain, no rain… ? "

Derrière l’imagerie populaire de ce type de "grand messe", tout ne s’est pas déroulé comme prévu : débordements, problèmes de logistique ou d’assainissement, mécontentement des citadins, approvisionnement… et puis la pluie ! Autour de cet épisode météo, un chant est lancé par les organisateurs, pour tenter de contrer l’orage :

si on est positifs et ensemble, on pourra peut-être arrêter la pluie.



Bien que repris par les 500 000 festivaliers, le chant n’eut aucun effet. N’est pas chamane qui veut et une incantation, même scandée collectivement, n’a aucun pouvoir sur la réalité. La pluie a transformé les champs en une mer de boue, dans laquelle il fallut ensuite patauger.

"…grève générale, reconductible ?"

Cette métaphore à propos du "no rain " m’est revenue au cours des dernières manifestations contre la Loi Travail. S’il n’y a bien entendu aucun rapport entre Woodstock et la "Loi El Khomri", c’est l’affichage et la répétition en boucle du slogan "Grève Générale" qui a provoqué ce rapprochement.


Grève générale reconductible !

Mais qu’est-ce qui justifie un appel à la grève générale, qui plus est "reconductible", si la réalité des luttes engagées ne se donne pas les moyens réels de briser les diktats du capital et d’y opposer des pratiques directes contre l’économie ? Qu’en est-il des perspectives d’étendre et d’implanter le mouvement aux usines, à la banlieue et en régions ? Pour qu’une grève générale ait une chance de succès dans son dépassement et sa mutation, ne faut-il pas qu’il y ait une organisation (ou auto-organisation) préalable, enracinée chez ceux qui, au quotidien luttent et s’organisent, y compris politiquement et syndicalement ? Plus que des questions, ce sont des points d’organisation.

Bref, la grève générale, à considérer tant sur les aspect quantitatifs du rapport de force, que sur les aspects qualitatifs de constructions avec ceux qui enrichissent les luttes, n’est ni un slogan à répéter de façon "pavlovienne" à chaque embryon de mouvement, ni une "solution miracle" à une situation ponctuelle, fût-elle la Loi travail. Elle est à construire pour ne plus se retrouver "sous l’eau ou dans la boue".